L'Archipel connaît un afflux massif de visiteurs, dont un quart viennent de Chine. Pour l'économie nippone en crise, c'est un bienfait essentiel. Mais, revers de la médaille, la façon d'agir des touristes heurte de plus en plus les locaux.

C'est un hôtel plutôt chic quoique vieillot de la province japonaise, avec vue sur le mont Fuji. Situé sur la presqu'île d'Izu, à une centaine de kilomètres au sud de Tokyo, il accueillait en janvier un groupe de touristes thaïlandais. Adultes arpentant le restaurant en discutant d'une voix vive sur Skype, enfants se ruant sur la fontaine de chocolat... : l'attitude de ces clients au buffet du soir a choqué les employés nippons. « Dépêchez-vous de prendre des tempura tout juste préparés, a même glissé un serveur à un client japonais. Sinon, ils vont tout prendre... »



En 2015, l'archipel nippon a connu un afflux massif de touristes : 19,7 millions (un chiffre en hausse de 47,1 % sur un an), dont un fort contingent de Chinois (4,99 millions ont foulé le sol nippon l'année dernière, un nombre en progression de 107,3 % sur un an). Et la dynamique se poursuit, malgré certaines inquiétudes alimentées par le ralentissement économique. Avec cette déferlante, les Japonais sont de plus en plus choqués par la décontraction teintée de sans-gêne de certains visiteurs.

Des consommateurs frénétiques
Les congés pour le Nouvel An chinois qui ont démarré le 7 février ne vont sans doute pas améliorer les choses. Les grandes enseignes ont ainsi méticuleusement préparé cette période. « Ces clients génèrent 80 % de nos ventes en détaxe », observe-t-on au grand magasin Matsuya de Ginza. Il faut être aux petits soins pour des touristes souvent pressés, adeptes de ce que les Japonais appellent désormais le bakugai, littéralement « explosion-achat », pour traduire leur frénésie de dépenses — un phénomène qui fait le plus grand bien à l'économie nippone.
Seulement, ces visiteurs peinent, selon les habitants, à s'adapter aux coutumes locales. Même si la situation s'améliore quelque peu, les Japonais n'hésitent jamais à pointer les comportements de ceux qui ne font pas la queue, fument n'importe où, crachent par terre, mangent des snacks dans les magasins avant de les acheter ou encombrent les entrées avec leurs valises.

Les Chinois particulièrement visés
« Il est étonnant de voir des visiteurs chinois accroupis sur les trottoirs en train de s'interpeller haut et fort », glisse ainsi un cadre d'un géant des cosmétiques, quelque peu moqueur, en parlant des touristes venus à Ginza, cœur du chic tokyoïte, où ce genre d'attitude est pour le moins inusité.
En février 2015, une télévision nippone avait consacré une longue séquence à une femme qui avait laissé son enfant uriner devant un magasin de Ginza, alors que le Japon a des toilettes gratuites, propres et accessibles à peu près partout. Interrogée par le journaliste, la mère ne s'était pas excusée. Le comble de l'impolitesse dans l'Archipel.

Ces problèmes inquiètent notamment les autorités chinoises, qui se soucient de l'image de leur pays. Média officiel du Parti communiste chinois, l'agence de presse Xinhua a ainsi pris l'initiative, en mai 2014, de rédiger « Six recommandations et six interdits » fondés sur le précepte chinois disant : « Quand tu entres dans un village, suis les coutumes locales. »

 

Source : Le Monde

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