Charlie Hebdo : l'opinion publique nippone peine à percevoir la dimension plus symbolique du massacre

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Après l'attentat de Charlie Hebdo, l'opinion publique nippone peine à percevoir la dimension plus symbolique du massacre de mercredi et notamment l'atteinte à la liberte d'expression.

 

 

Comme la plupart des dirigeants de la planète, Shinzo Abe, le premier ministre japonais, a fait parvenir, hier, un message de soutien aux autorités françaises et condamné "l'acte terroriste" perpétré à Paris. Tous les grands médias ont évoqué factuellement ces deux derniers jours l'attaque de la rédaction de Charlie Hebdo puis la traque des assassins.

Pourtant, l'opinion publique nippone peine encore à percevoir la dimension plus symbolique du massacre de mercredi et notamment l'atteinte à la liberte d'expression qui connaît des frontières différentes dans l'Archipel. Dans un pays obsédé par le consensus, la culture de la satire est ainsi très mal comprise. Les médias les plus irrévérencieux se permettent dans l'Archipel au maximum des caricatures grossissant les traits physiques d'un personnage public ou s'amusent parfois à l'affubler d'un costume décalé mais jamais ils n'oseront jamais risquer d'offusquer ou de peiner une personne ou une communauté.
S'imposant une forte dose d'autocensure pour ne pas risquer de fragiliser l'homogonéité ou l'harmonie de la société, ils s'interdisent d'aborder avec humour nombre de sujets jugés tabous.

Ainsi, la catastrophe de Fukushima et le drame des habitants de la région ne pourra jamais faire l'objet d'un trait décalé. En 2012 puis en 2013, les médias nippons et le gouvernement s'étaient d'ailleurs publiquement offusqués des caricatures diffusées en France à ce sujet par le Canard Enchaîné et France 2. Ils n'avaient ainsi pas goûté un photomontage diffusé dans une émission de Laurent Ruquier, montrant le gardien de but de l'équipe japonaise de football affublé de quatre bras, grâce, selon les mots de l'animateur, à "l'effet Fukushima".

Ne s'attardant pas sur cette défense de la liberté d'expression, certains médias nippons préféraient, ce matin, expliquer que l'attentat de Charlie Hebdo pointait surtout certaines failles du modèle français. Selon le Nikkei, le drame serait lié à la forte densité d'immigrés dans le pays et à l'incapacité de la nation à les intégrer économiquement du fait de la montée rapide des inégalités. En s'attardant sur ces enjeux, les médias cherchent à pointer en creux le succès du modèle conservateur japonais, qui a lui refusé l'immigration, réussi le plein emploi et privilégié une grande homogénéité des revenus entre les différentes classes sociales.

Source : Les Echos