Relance au Japon : une leçon de volontarisme

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Pressé par les médias, les marchés, les patrons, l'opinion et les économistes aux aguets, le Premier ministre japonais Shinzo Abe a décoché vendredi la «troisième flèche» de sa politique économique. Et selon lui: le tir est précis, la rapidité garantie.

 


Les deux premières flèches de sa politique économique «Abenomics (largesses budgétaires, souplesse monétaire) étaient déjà depuis plusieurs mois sorties du carquois de l'archer Abe, mais tout le monde attendait depuis lors qu'il tire la troisième.

Selon l'intéressé qui avait déjà fait trois discours (les 19 avril, 17 mai et 5 juin) pour expliquer les différents pans de sa stratégie, le temps mis était celui de la réflexion pour élaborer un plan de 100 pages assorti d'un tableau-échéancier à moyen terme de mise en oeuvre qui s'étend d'abord sur quatre ans... et 50 pages supplémentaires.

Approuvé vendredi matin en conseil des ministres, ce programme peut être vu soit comme un catalogue de souhaits dont nul ne sait s'ils sont réalistes, ou au contraire comme un plan d'objectifs chiffrés et de projets de réformes, adossé à un calendrier serré, qui constituent autant d'engagements.

Trois grands volets

Sous le slogan «Japan is back» (le Japon est de retour), ce plan comprend trois grands volets: revitalisation industrielle, création de nouveaux marchés stratégiques, développement international.

Il a été établi au terme d'une douzaine de réunions d'un aréopage d'hommes d'affaires, de ministres et économistes, sous la présidence de M. Abe en personne.
«Ma bataille a commencé il y a six mois pour rétablir l'économie», assure le protagoniste en chef dans un message vidéo sur le site internet de son bureau.
«Avec ces trois flèches, le produit intérieur brut du Japon s'élèvera en moyenne de 2% chaque année dans la décennie à venir», promet entre autres ce Premier ministre de droite revenu aux commandes du pays le 26 décembre, après une large victoire de son Parti Libéral-Démocrate (PLD) au scrutin législatif anticipé dix jours plus tôt.
«Je vais tous vous soutenir dans vos défis», a lancé à ses compatriotes celui qui lors de sa première primature ratée en 2006-2007 plaidait déjà pour «la deuxième chance».

Le terme «Abenomics», qui existait déjà à l'époque, n'avait guère fait parler de lui. Aujourd'hui, c'est LE mot de l'année, indissociable du nom d'un chef de gouvernement décidé et ostentatoirement actif.

M. Abe vise toutes les catégories du public: les femmes (qui ont du mal à concilier vie professionnelle et vie privée), les enfants (sans place en crèche), les jeunes (qui veulent partir à l'étranger), les agriculteurs (pour que leurs produits trouvent aussi des débouchés à l'étranger), les chercheurs (pour encourager les innovations), les entrepreneurs (pour faciliter l'expansion de leurs affaires au Japon et à l'extérieur).
«Je promets d'augmenter le revenu par habitant du Japon», a poursuivi M. Abe qui souligne que ce revenu stagne voire baisse parfois depuis plus de 20 ans.
«La différence avec des plans précédents résidera dans la rapidité de mise en oeuvre», a d'ores et déjà assuré le Premier ministre. Et d'ajouter «il n'y aura pas de fin à la réforme. La stratégie de croissance se poursuivra dans le but d'aller encore plus loin».

La fiscalité des entreprises revue à la baisse
Parmi les mesures proposées pour effacer les séquelles de deux décennies de fluctuations entre croissance et récession, et quinze ans de déflation, figurent notamment: une baisse des impôts des sociétés sous condition d'investissement, une intensification des aides à l'innovation, des soutiens ciblés aux secteurs jugés clefs, une amplification des mesures pour pousser les femmes à travailler et les salariés à bouger, une extension des programmes de recherche (notamment dans les domaines de l'énergie et de la santé), un renforcement de l'attractivité du Japon (pour les entreprises et les touristes), etc..
«C'est une stratégie très précise accompagnée d'un calendrier clair et je souhaite qu'elle entre en application», a commenté vendredi le président de la fédération patronale Keidanren.
M. Abe devait en dire plus lors d'une conférence de presse dans la journée avant de partir pour l'Europe où il ira défendre «les trois flèches de ses Abenomics» devant ses sept partenaires du G8, les huit pays les plus puissants, lors d'un sommet en Irlande du Nord les 17 et 18 juin.

 

source : Libération